Le témoignage d'un demandeur d'asile
L’Effet Papillon .. Vous êtes-vous demandé quelle a été votre meilleure réussite ? Excusez-moi, je vais commencer depuis le début. Je me présente. Je m’appelle L. et je suis né en 2018 en France et j’ai 18 ans… Excusez-moi une fois de plus… je vais recommencer par le vrai début… Mais la mort n’est pas toujours la fin ; des fois, c’est le début.
Le 01/08/2018, mon rythme cardiaque s’accélère, mes paumes deviennent moites, mes genoux faiblissent, mes bras sont lourds. Je tends mon passeport et j’attends. Je suis né… Je ne savais pas marcher, je ne savais pas manger, je ne savais pas me laver et je ne savais pas parler, mais étonnamment, je savais parler la langue de ma mère pour qu’elle puisse toujours me comprendre, même sans parler. A un mois de ma nouvelle naissance, c’était un temps comme le premier jour à l’école maternelle. Ce jour-là, je n’allais pas là-bas avec des fleurs à la main, ni avec une chemise blanche, ni avec bonheur. Au contraire, j’avais peur. « Votre destination est devant vous » me dit Google Map. Mon rythme cardiaque s’accélère, mes paumes deviennent moites, mes genoux faiblissent, mes bras sont lourds, ma vue devient noire, mon corps devient chaud ; c’est la même sensation, mais je ne me souviens pas d’où je la connais. Je regarde… il est indiqué « CPU- Coup de Pouce Université », mais qu’est-ce que ça ? J’en ai aucune idée. Je frappe à la porte au lieu de sonner. Une gentille femme avec un gentil sourire m'ouvre la porte. Je suis entré. Un homme ordinaire, gentil, qui travaille à quelque chose dans le plafond descend de son échelle. Il me propose un RDV pour le lendemain avec une professeure. Je me demande pourquoi il est si gentil avec moi ? Pourquoi l’homme qui travaillait à réparer le plafond m’a-t-il donné un RDV? Comment un ouvrier pouvait-il en décider ? Plus tard, j’ai compris que c’était le directeur…
En tout cas je suis parti. Je sentais que je n’avais plus peur. Après quelques semaines nous n’étions plus des nouveau-nés, nous étions déjà des lycéens. Nous pouvions parler, nous pouvions nous exprimer, nous avions la liberté. Et comme c’est toujours mieux de voir une fois que d’entendre cent fois, nous avons visité des lieux autour de Lyon, des lieux historiques, des lieux culturels…
En 1972 le météorologue Edward Lorenz a fait une conférence où il pose une question : «le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut-il provoquer une tornade au Texas ?» La réponse est « oui, il le peut… ». Donc je dirais que par un battement de vos ailes, vous nous avez formés ; maintenant c’est à nous. Alors je dirais que vous pouvez vous attendre à un vent qui va changer le monde. Maintenant, que j’ai fini d’écrire, j’ai encore ce sentiment bien connu et plusieurs fois éprouvé, et je réalise enfin d’où il me vient. |