Réflexions sur la situation du CPU


NB : L’essentiel de ce texte est extrait du rapport annuel présenté le 5 mai 2020
à la réunion annuelle des institutions ignatiennes fondatrices du CPU.

La situation du CPU

Comme par le passé, les activités du CPU ont été largement appréciées non seulement par les étudiants et demandeurs d’asile, et aussi nos 200 bénévoles, mais aussi par nos partenaires habituels qui nous ont souvent témoigné leur reconnaissance et leur coopération : Profs de fac, services sociaux, associations étudiantes, Ecoles de français, en particulier Lyon2 et Catho.

Les statistiques 2018-2019 ont cependant montré un tassement du nombre des étudiants. Celui-ci s’est nettement accentué en 2019-2020 malgré de nombreuses démarches et efforts de communication auprès des institutions. La cause en est difficile à préciser de façon certaine : Baisse du nombre des étudiants internationaux en France, découragement par rapport aux mouvements sociaux (blocages répétitifs des amphis de Lyon2 en 2018-2019, effet d’annonce de la hausse considérable, finalement annulée, de droits d’inscriptions pour les étudiants étrangers, gilets jaunes en fin 2019…).
A quoi s’ajoute cette année la crise du coronavirus. Si bien que nous sommes tombés cette année à 450 étudiants, au lieu de 600 (parmi lesquels 100 demandeurs d’asile, dont le nombre a été maintenu stable !). Il est à craindre qu’à la prochaine rentrée beaucoup d’étudiants internationaux renonceront à venir étudier en France si la pandémie n’est pas résorbée. Cependant rien ne laisse présager que cette baisse d’effectifs soit durable dans les années à venir.

A court terme
, malgré une baisse à prévoir des effectifs de bénévoles âgés de plus de 60 ans ou de santé fragile, cela pourrait nous orienter vers un renforcement de l’accueil des demandeurs d’asile en cours de français, moyennant un effort de formation des formateurs bénévoles du CPU pour l’enseignement du français. Mais cela ne sera pas sans conséquence négatives sur le budget du CPU qui repose en grande partie sur la participation des étudiants. En revanche une conséquence positive pourrait être une plus grande mixité du public et une plus grande conscientisation des bénévoles.

Alors que jusqu’ici la communication passait essentiellement par le bouche à oreille des étudiants, ce début d’année universitaire avait été pourtant marqué par un bel effort de communication en direction notamment
- des étudiants (Nombreuses distributions de flyers à Student welcome desk) en septembre-octobre)
- des écoles de français (rencontres avec les directrices de l’ILCF (UCLY) et CIEF (Lyon2).
- Envoi de mails à tous les profs de Lyon2 et Lyon3 + quelques-uns de Lyon1 et INSA
- Collaboration soutenue avec une association étudiante naissante, spécialisée dans les étudiants internationaux (PILE : Pôle international Lyon étudiant)
- Mission donnée à une bénévole pour démarcher en particulier les écoles supérieures de Lyon (Bureau des relations internationales et Bureau des étudiants)

La dimension ignatienne du CPU


Depuis de nombreuses années, une majorité non négligeable de bénévoles venus au CPU ont peu ou pas de lien avec l’Eglise et encore moins avec la « culture » ignatienne, c’est à dire proche des jésuites à l’initiative du CPU. Mais leurs motivations humanitaires s’accordent aisément avec le discours et la pratique du CPU. Les religieuses, même en costumes, ne constituent pas un obstacle ! Mais les ignatiennes sont en général « civilisées ». Quant aux membres de CVX (Communauté Vie Chrétienne), elle aussi fondatrice du CPU, leur nombre s’est réduit à moins de 10 par rapport aux 20 des premières années. En majorité ils sont membres du CA. C’est avec un petit groupe d’ignatiens que nous sommes en train de réviser la « charte de l’accompagnement » du CPU, surtout pour en simplifier la lecture. Auprès des responsables régionaux de CVX, nous avons obtenu que les infolettres du mouvement indiquent systématiquement un lien vers celle du CPU et que les réunions régionales ménagent une petite place (orale ou écrite) au CPU. De notre côté, nous travaillons à ce que la même démarche soit effectuée par les autres membres de ROSAE, à St Denis et à Grenoble, pour qu’à terme, et tous ensembles, nous invitions l’équipe nationale à encourager les autres régions à développer le réseau des « coups de pouce » aux étudiants internationaux. Ce sera long !

L’organisation du CPU

Grâce au travail d’un informaticien professionnel bénévole, un logiciel de gestion des étudiants et bénévoles a été mis au point. Il a nécessité de nombreuses révisions l’année dernière. Cette année a été meilleure. En s’appuyant sur lui, deux à trois équipes de deux bénévoles se sont relayées chaque semaine pour recevoir les étudiants nouvellement inscrits ou réinscrits en vue de leur trouver les formateurs qui correspondaient à leurs besoins et aux disponibilités des uns et des autres. Le problème est complexe et les étudiants changent régulièrement d’horaires.
Les journées pédagogiques des bénévoles (septembre, novembre, mars et juin) rassemblent chaque fois une bonne centaine de personnes. Elles ont notamment permis d’inviter des personnalités en rapport avec la vie étudiante (psychologues, projet théâtre, conteur) Celle de mars dernier (annulée) devait accueillir des interventions de la directrice du CIEF (Lyon2), du permanent de PILE et d’un intervenant du CIEP (Centre ignatien d’études pédagogiques) sur l’accompagnement pédagogique ignatien). Trois de nos quatre réunions trimestrielles marquent l’échéance de parution de l’Infolettre du CPU, œuvre d’une petite équipe qui fait appel à la participation de tous.

La période du confinement

Le CPU a fermé ses portes le 13 mars 2020, en même temps que les universités. Beaucoup d’étudiants, en particulier les étudiants de français, sont repartis dans leur pays quand ils en avaient les moyens… et les avions. J’ai personnellement téléphoné au moins une fois à chaque bénévole pour l’encourager à maintenir vivant un lien personnel par mail ou par téléphone. Ce que beaucoup ont fait. Très vite s’est mise en place une réunion zoom qui a réuni chaque lundi soir jusqu’à 70 bénévoles heureux de rétablir un lien entre eux et de se donner des idées de pédagogie nouvelle ou de soutien. Les responsables de la bureautique ont envoyé à chacun plusieurs modes d’emploi permettant de travailler à distance. Par ailleurs, grâce à ces réunions, plusieurs actions de soutien aux étudiants en précarité psychologique ou budgétaire ont rapidement été mises en place :
1. Une cellule d’écoute du genre SOS-amitié
2. Une permanence de distribution de denrées alimentaires chaque lundi matin au CPU grâce aux liens que nous entretenons chaque mois depuis octobre 2019 avec la Banque alimentaire.
3. Une cagnotte qui permet de glisser (contre reçu !) une petite enveloppe dans le panier de ceux qui viennent chercher des denrées alimentaires.
4. Une distribution de cartes téléphoniques pour des demandeurs d’asile sans ressource. Ces mesures de soulagement ont suscité une joyeuse et reconnaissante surprise auprès des intéressés qui se sont trouvés encouragés à tenir bon malgré l’épreuve. A ce jour, la cagnotte a dépassé nos espérances : plus de 120 donateurs. Nous les utiliserons loyalement au service des personnes visées et un rescrit fiscal sera envoyé à chaque donateur.

Depuis le 11 mai

Le CPU continue d’inscrire quelques nouveaux étudiants qui demandent principalement des corrections d’écrits (mémoires, thèses ou rapports de stage), ce qui est facile à réaliser à distance. Comme la grande majorité des bénévoles ont dépassé les 60 ans, ils ne viennent plus guère dans nos locaux et travaillent à distance, les uns pour les relectures de mémoires et thèses, les autres pour entretenir des liens, encourager certains et entretenir leur effort d’apprentissage de la langue. Un petit nombre continue à assurer des cours en présentiel dans nos locaux, à condition de s’y retrouver en tout petit nombre et avec toutes les mesures de précaution nécessaires.

Que sera l’avenir ?

Dans l’état d’incertitude présente, il est bien difficile d’imaginer ce que sera la rentrée de septembre. Il n’est certes pas interdit d’imaginer que le coronavirus aura disparu de lui-même ! Pourquoi pas ? Mais il parait hautement probable que cette crise nous poussera à innover dans nos méthodes de travail. Beaucoup ont découvert les économies de déplacement grâce au télétravail. Certains cours et groupes de conversation peuvent en effet se dérouler en téléconférence. Nous devrons peut-être aussi remplacer les repas quotidiens entre bénévoles et étudiants, si utiles pour mieux se connaitre, par des rendez-vous buffets périodiques dans un espace élargi. Mais de nombreux problèmes restent à résoudre et nous obligeront à innover, en particulier pour ceux qui ont plus difficilement accès à l’informatique, les demandeurs d’asile …et les bénévoles moins expérimentés. Notre objectif est toujours d’apporter un peu paix et de compréhension dans les relations internationales. Il motivera puissamment notre créativité au service du plus grand nombre.


Et pour conclure :
Le mot de Jean-Noël


Au cours de ces deux mois et demi de confinement, je ne compte pas les étudiants qui nous ont téléphoné ou écrit pour prendre des nouvelles de leurs formateurs. Certains depuis la Chine, la Corée, l’Iran, le Brésil ou le Canada…. ou tout simplement depuis Lyon.
Plusieurs même nous ont envoyé des masques en sachant que nous en manquions en France ! Ces appels ne m’ont pas seulement touché pour la sollicitude dont ils témoignaient. Ils m’ont rempli de joie parce qu’ils témoignaient de la réciprocité des relations que nous essayons de tisser, jour après jour, au CPU.
Ces étudiants n’étaient pas seulement conscients de ce qu’ils avaient reçu ici. Ils témoignaient qu’une vraie relation s’était construite au fil des jours. Tout naturellement, ils se sont donc sentis librement engagés dans un geste symbolique en retour. Ils ont participé spontanément à notre objectif central qui est d’agir pour la paix.
Le mot Merci n’est plus à sens unique !

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