LE JOURNAL D'YVES

Yves reprend son journal d'accompagnateur de thèses ou de masters
en exposant les enseignements qu'on peut tirer du cas espagnol
qui a fait la "une" de la presse espagnole en septembre.

MASTER, THESE ET POLITIQUE : LES LEÇONS DU CAS ESPAGNOL

Il est rare que des problèmes d'inscriptions en Master ou de jurys de thèse de doctorat fassent les grands titres des journaux : c'est pourtant ce qui s'est passé en début septembre 2018 en Espagne.

Une Ministre doit démissionner à cause d'un Master insuffisamment validé. Le leader de l'opposition, qui s'empare de l'affaire, est à son tour suspecté d'avoir indiqué dans son CV un diplôme non obtenu. La Présidente de la métropole de Madrid doit renoncer à un master délivré dans des conditions douteuses. Un important leader politique attaque la thèse du Président du Conseil, accusé d'avoir plagié… mais la presse s'intéressant à son tour à son cas, relève qu'il indique dans des documents officiels "doctorant" alors que l'Université concernée déclare qu'il n'est plus inscrit depuis plusieurs années !

La presse se précipite sur la thèse du Président du Conseil, dont on s'aperçoit qu'elle n'est pas disponible en ligne…et en soumet le texte aux logiciels de détection de plagiat : un débat s'instaure sur ce qu'est le plagiat, quel pourcentage d'autoplagiat est acceptable, etc.

Finalement, le plagiat n'est pas avéré mais plusieurs professeurs expriment leur circonspection quant à la qualité du jury (on dit "tribunal" en Espagne) ayant décerné le grade de docteur.au Président du Conseil. Rarement des questions académiques n'avaient occupé à ce point l'espace public. Au-delà des péripéties de la complexe vie politique espagnole, plusieurs remarques générales peuvent être tirées de cette "affaire", qu’en Espagne on a appelé le «Mastergate » :

- La multiplication des formations et des diplômes d'enseignement supérieur a partout créé une grande confusion et n'a pas été accompagnée d'une information du public sur les filières, les titres et leur valeur. L’Espagne n’est pas le seul pays dans ce cas. Les conditions de délivrance de diplômes restent parfois opaques. Des programmes alléchants drainent des étudiants dans des formations douteuses.

- De nombreuses universités privées ont été créées ces dernières années en Europe (et dans le monde) dont certaines n'ont pas géré la délivrance de leurs grades et diplômes avec toute la rigueur désirable (une université privée était impliquée dans l'un des cas espagnols). Le respect strict des règles relatives aux conditions d'inscription, à la validation des crédits, à la soutenance et la délivrance des diplômes, qui peut apparaître bureaucratique, reste une garantie de sérieux nécessaire même si elle n'est pas suffisante.

- La publication ou la mise en ligne des travaux de recherche offre un contrepoids indispensable à d'éventuelles manœuvres discutables. L’accès le plus libre possible aux documents est une garantie pour la création des connaissances.

- Le plagiat reste un fléau et l’on ne donnera jamais assez de conseils aux étudiants pour les aider à ne pas tomber dans ce piège.

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