Interculturalité :
Les étonnements de nos bénévoles

BONNES ET MOINS BONNES SURPRISES...

Facilité et simplicité dans les rapports humains avec les bénévoles et des étudiants entre eux :

Ce qui m’étonne toujours, par-delà les différences linguistiques et culturelles, c’est la confiance et la simplicité avec lesquelles, dans la plupart des cas, les étudiants internationaux communiquent avec nous, les bénévoles. La différence d’âge ne semble pas leur poser de problèmes, même pour les étudiants les plus jeunes. Je trouve d’ailleurs que par rapport aux premières années du CPU, on sent moins de retenue de la part des étudiants : est-ce que cela est révélateur d’une espèce de «marque de fabrique » du CPU qui s’est imposée progressivement, un lieu où l’étudiant se sent un peu chez lui ?

Je suis favorablement étonnée de la simplicité des étudiants pour dire leurs besoins ou répondre aux propositions. J’aime aussi leur accueil mutuel, leur écoute réciproque. Le groupe étant mouvant, l’accueil des nouveaux est toujours positif. Chacun s’intègre ainsi facilement.

Deux faits me surprennent : d’une part, la rapidité avec laquelle se créent des liens avec de parfaits inconnus, d’âge et de culture différents. Il m’est devenu difficile de faire des généralisations (par exemple, les asiatiques, les filles, les musulmans….etc.). Je suis très concernée par chacun d’entre eux, dans sa singularité et dans mon rapport affectif avec cet « étranger » dont j’oublie la nationalité. D’autre part, à force de discuter sur des sujets pas nécessairement consensuels, je suis surprise qu’ils me fassent encore beaucoup évoluer.

Les rapports avec les étudiants (qui restent !) sont excellents et c’est très plaisant. J’ai toujours aimé le contact avec les jeunes. Comme ce sont de jeunes adultes on peut aborder des sujets d’actualité, des problèmes de société (différences entre ce qui se passe ici et chez eux et la manière ou l’histoire ou la politique sont traitées dans leur pays et ici nos civilisations respectives, etc) Quand les élèves ne sont pas du même pays les discussions sont riches : ils s’écoutent attentivement.

Je suis bénévole au CPU depuis un an et demi. Je suis non pas vraiment surprise, mais impressionnée par les relations très simples des étudiants entre eux, alors que je pensais que certaines nationalités engendraient plutôt une gêne, ou même plus, entre étudiants.

…cela, malgré le fait qu’il existe des écarts dans les modes de communication:
Une cambodgienne indique à un bénévole qu’elle communique avec ses parents par des télégrammes.
Les télégrammes, pour lui c’est du bon vieux temps ! Mais ce bénévole apprend le soir, en un autre lieu, qu’en fait elle voulait parler de TELEGRAM, un outil du genre WhatsApp ou Snapchat! Le numérique et moi, reconnaît-il, ça fait 2. Et d’ajouter : d’ailleurs j’ai été surpris de voir que les mails que j’envoie aux étudiants, ils les lisent peu, car ce n’est pas la première chose que les jeunes regardent sur leur téléphone portable. J’aurais dû leur envoyer un « Telegram » !

.. et des écarts culturels importants dus notamment aux croyances et aux modes de vie :

Je suis féministe « parce qu’il le faut bien ». Or, dans mon cours de conversation, un étudiant syrien musulman très croyant voudrait faire sa vie en France et rêve d’épouser une française. Mais il «se prend des râteaux » sans trop comprendre ce qui lui arrive ! Ajoutez, dans ce groupe de conversation, une étudiante coréenne encore plus féministe que moi : le mélange est détonnant.
A propos du « traitement » des femmes, Dieu et les écritures saintes sont l’argument choc que met en avant mon étudiant. Aussi ; je lui oppose les découvertes scientifiques sur « le genre ».

Ce qui m’étonne, c’est d’abord que le mélange cité plus haut n’a pas explosé (honnêtement, parfois c’était limite.). Ce qui m’étonne ensuite c’est que nous avançons - à petits pas certes – mais réellement et réciproquement vers la compréhension.
Je pense que si nos relations humaines sont restées malgré cela très amicales; on le doit, pour ma part, à mon grand âge qui me permet de replonger par la mémoire dans la situation des femmes françaises par le passé (ma mère, mes grand- mères, du temps où on ne maîtrisait pas les naissances ), à mes manques et à mes espoirs et aussi à mes nombreux voyages dans le monde où j’ai constaté la logique d’autres organisations sociales, organisations toujours liées aux conditions de vie. Et ajoute cette bénévole, peut-être qu’on le doit surtout au fait que Dieu - quelle que soit sa définition, et le nom qu’on lui donne- participe Lui aussi à mon cours de « conversation (très ) française »… ? Et c’est ça qui m’interpelle le plus

Surprise d'une autre bénévole : J’ai un souvenir qui se rapporte à une jeune vietnamienne qui est devenue une amie. Lorsque cette jeune femme vietnamienne m’a invitée à manger, je lui ai apporté un petit bouquet de fleurs, mais cela l’a fait beaucoup rire...
Voici ce qu’elle m’a dit : “Dans mon pays, il n’y a qu’aux divinités que nous apportons des fleurs que nous déposons dans une petite niche, située dans la maison, endroit qui nous sert de lieu de prière.”

La découverte de l’eau chaude racontée par une bénévole :.
Qui n’a pas été accueilli au CPU quelques minutes avant quatorze heures par un «tu prends un café ? », «tu veux un thé ? » émanant d’un bénévole ou d’un étudiant en train de remplir une tasse d’eau chaude dans le hall. Rien de plus banal en somme dans cette maison !
Et voilà que la semaine dernière, un tout nouvel étudiant afghan me propose une tasse d’eau chaude.
Je lui réponds illico "oui", et m’apprête à préparer un thé ou un café en sa compagnie lui demandant ce qu’il préfère.
Il ne veut rien dans sa tasse ! Juste de l’eau chaude !
«Tu es malade, tu as mal à la gorge, tu veux du miel, du citron pour ton eau chaude?»
Non non ! Il ne veut rien ! Stupeur ! Juste de l’eau chaude !
Comme il est très récemment arrivé en France, je lui assure que l’eau du robinet est potable et qu’il ne craint rien à boire un verre d’eau fraiche pour se désaltérer !
Mais il le sait et il insiste : de l’eau chaude !
« ON » boit donc de l’eau chaude ?
J’appelle du regard les quelques étudiants assistant à la scène… Et les palabres CPUbuesques commencent alors !
Je découvre que cet étudiant n’est pas un cas isolé et qu’en Asie, c’est monnaie courante de se balader avec un thermos d’eau chaude. On m’explique que c’est excellent pour la digestion, pour la santé, que c’est même un détoxifiant à moindre coût !
Je n’en reviens pas ! Et je ne reviens toujours pas de mon idiote insistance à lui proposer autre chose ! J’en ris encore !
Eh oui ! Je n’ai pas inventé l’eau chaude pourrez-vous dire ! Heureusement que le ridicule ne tue pas !

Courage et optimisme de la plupart des étudiants :
Je reste étonnée par la capacité des étudiants du CPU à quitter leur pays, même sans comprendre ni parler un mot de français parfois ! Quelle confiance ! Venir et tenir là, au milieu de tous, à la Fac, en cours tout en français, et après, « débrouille-toi » ! Faut le faire ! … Surtout que les étudiants français semblent les ignorer royalement – ils ne savent pas ce qu’ils perdent ! –.

Je suis surpris par cet étudiant chinois à cause du peu d’appui et de suivi de l’Université pour le projet de thèse qu’il espère lancer en philo. En plus, tout semble un défi : un maniement du français encore « moyen », sur un sujet de philo subtil ! Si ça se trouve on va lui dire « OK » et dans deux ou trois ans ils lui diront peut-être d’arrêter, me dis-je. Ils viennent de loin, ils risquent leur avenir, et on leur donne de marcher sur des œufs. Ce n’est pas une ballade tranquille. Mais cet étudiant, entre hauts et bas, semble y croire encore, finalement. J’espère que nous saurons l’encourager comme il convient…

A la préparation du stand sur la Syrie et pendant le déroulement de l'anniversaire du CPU, j'ai été plus particulièrement frappée par le courage de ces jeunes gens. Ils voulaient montrer un autre visage de leur pays. Malgré leur souffrance, ils se sont montrés ouverts et souriants. C'est un plaisir et une grâce de bénéficier de tels contacts.

Soif d’apprendre, travail et assiduité des étudiants : de bonnes et de moins bonnes surprises :
Tout d’abord ce qui m’étonne c’est le fait que certains étudiants s’inscrivent et, parfois, viennent très peu : il arrive même que ce soit une unique fois ! (3 petits tours et puis s’en vont !) Cela me pose question ! Quels sont leurs objectifs ? Mais, il arrive, évidemment que d’autres soient assidus ou préviennent quand ils ont un contretemps et se montrent très intéressés par les cours. Ce qui m’étonne beaucoup et que j’admire c’est leur facilité à acquérir du vocabulaire, c'est-à-dire sans passer forcément par l’écrit : je les ai en oral et ils emmagasinent les mots directement à l’aide de leur mémoire une fois qu’ils ont été bien compris.

Surprise sur la ténacité de certains étudiants et plus particulièrement les jeunes d’origine asiatique. Certains parlent un très bon français au bout de quelques années seulement. Par contre, d’autres, d’origine plutôt orientale, ont une attitude plus désinvolte et sont beaucoup moins organisés dans leurs tâches. Mais tout ceci finit par s’équilibrer.

Ce qui m’a étonné et continue de m’étonner chez les étudiants c’est cette soif insatiable d’étudier le français que l’on présente souvent comme une langue difficile. Ils sont d’une grande gentillesse et parlent avec facilité des coutumes de leur pays. Pour le bénévole que je suis c’est une source de plaisir et d’enrichissement inespérée. Je voyage à travers le monde à chaque intervention.

En cours de conversation, mes étudiants sont attentifs et respectueux. Mais ils ne s'investissent pas outre mesure dans le cours; l'assiduité dépend beaucoup des pressions extérieures. Les étudiants sont très mobiles, ils voyagent facilement dans toute l'Europe, même pour un week-end. Le recours aux smartphones et autres traducteurs électroniques remplace de plus en plus un effort d'intuition.

Certains étudiants sont très assidus, d’autres moins, pour diverses raisons.
Le mardi après-midi, une étudiante vient chez moi pour la correction de son mémoire de Master, (par manque de place au CPU. ndlr). Elle est très assidue. Elle travaille beaucoup.

Cette année mon groupe de conversation connaît des variations fortes. Dans sa composition, et dans le nombre de venants chaque fois. Sur 5, ça oscille entre 4 et 1 ! Il me semble que cela traduit des rapports variés au besoin de se dépatouiller en français, du fait que pour untel, la priorité est peut-être plus de trouver un travail, une autre, de passer un diplôme à l’étranger – tous ne sont pas fixés sur la voie définitive de leur métier plus tard –, tel(le)s autres, de d’abord fêter le Nouvel An en Chine, pour untel ça dépendra de sa copine française, mais pour une autre étudiante, c’est du sérieux, c’est toute sa famille qui a décidé de quitter une Italie estimée peu sûre côté avenir économique et politique…

Politesse – respect ouverture d’esprit :
J’apprécie beaucoup l’ouverture de mes étudiant(e)s, leur curiosité, leur fraîcheur, leur politesse et leur reconnaissance. J’ai invité 3 fois 2 étudiantes.et cela a été très agréable : les 2 dernières étaient mes élèves, les autres envoyées par le CPU. Quand j’ai invité mes étudiantes elles ont exprimé leur joie ce qui est rare chez des asiatiques qui sont, habituellement réservés.
Bref tout est positif à l’exception de mon questionnement sur l’assiduité.

Je suis étonnée de l’esprit de curiosité des étudiants étrangers, de leur ténacité dans les études. Il est parfois difficile de faire communiquer entre eux des étudiants de nationalités différentes sauf pour ceux venant d’Amérique Latine. Il faut du temps mais comme le groupe de conversation se renouvelle fréquemment les étudiants n’ont pas toujours le temps pour mieux faire connaissance entre eux.

Pour ma part, en tant que bénévole pour la deuxième année j’ai été étonnée par la motivation des étudiants à apprendre, par leur capacité d’adaptation et par le respect et la reconnaissance qu’ils témoignent envers leurs formateurs. C’est également surprenant de les voir s’entraider dans les groupes d’atelier

Tous mes étudiants soulignent l'importance de la CULTURE en France (il faut dire que j'insiste sur ce point dans le cours de conversation !!! car ils ne vont pas au cinéma, ni à la bibliothèque....) et du SPORT. Mais je suis étonné par le nombre de voyages qu’ils font, surtout les Chinois.

Quelques regrets ou difficultés de certains bénévoles :
Pour ma part, je regrette que beaucoup d’étudiants, lorsqu’ils sont repartis dans leur pays, ne nous donnent pas au moins une fois de leurs nouvelles. C’est un peu comme s’ils ont consommé et après …Ciao !.
Je suis restée cependant en relation avec certains (en France ou ailleurs, par internet) et c’est agréable d’apprendre leur évolution dans la société, les naissances… sans être accro.

La simplicité des relations et leur facilité m'étonne. La docilité des étudiants aussi. J'avais imaginé des relations plus complexes. Une difficulté subsiste cependant du fait de la diversité des cultures, souvent très éloignées les unes des autres, et que je connais peu (Europe de l'Est, Moyen-Orient, Asie, Amérique du Sud). Cette situation m'oblige à me questionner et "me mettre dans la peau", autant que faire se peut, de chacune de leurs cultures, pour mieux communiquer avec chaque étudiant

Pour ma part également que du positif dans nos échanges avec les étudiants internationaux. Toutefois il faut parfois veiller à se garder d'aborder certains sujets sensibles. Je repense à une de mes étudiantes chinoise qui m'a reprise devant toute la classe lorsque j'ai parlé à une étudiante taiwanaise de son pays en me disant "mon pays ne reconnait pas l'existence de Taiwan".

La politique : Il esttrès difficile de parler avec mes étudiants de la politique de leur pays ou des autres pays. Mais ils sont tous d'accord pourr souligner le manque de respect du Français vis à vis des responsables politiques : Ex petit journal, Charlie hebdo...

Le tutoiement rapide n'est pas toujors apprécié par les étudiants asiatiques notamment.

Les étudiants étrangers originaires d'Asie sont surpris par les soirées conviviales ( qui se prolongent au-delà du dîner) organisées par les Français. Ils sont surpris par le manque d’échange entre eux. Pour beaucoup, ils souhaiteraient des moments de rencontre au lieu de partir chacun chez soi après le cours. Je leur ai conseillé vivement de venir partager des repas au CPU et je vais voir comment ils peuvent s’inscrire pour un dîner chez des bénévoles: ils ne sont pas bien au courant de cela, moi non plus. Au-delà du CPU, il leur semble que les étudiants français ne sont pas trop attirés par les étudiants étrangers qui, eux, craignent de s’imposer.

La facilité des échanges entre étudiants et avec leurs accompagnants serait-elle due au constat d'un bénévole, à savoir l’universalité du genre humain ?

Mon étonnement est toujours le même : si nos étudiants étrangers, en fonction de leurs diverses cultures, ont des manières de penser différentes de la nôtre, en revanche leur affectivité ne paraît pas très éloignée de la nôtre. Comme si, sous toutes les latitudes, le désir d'entrer en relation avec autrui était partout le même. N'est-ce pas là une sorte de fond commun de l'humanité ?

Et pour finir, l’une des leçons que nous apportent nos étudiants sur notre propre pays :

La plupart de nos étudiants étrangers disent qu'ils apprécient beaucoup la France et son mode de vie. Tandis que nous-mêmes ne cessons de tout critiquer, nos étudiants, eux, trouvent que ce n'est pas si mal !
Il y a là de quoi nous faire réfléchir sur notre éternelle tendance (bien française!) au mécontentement...

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